Ci-dessus Meggie Samson vue par Clarke
LE PICTORIALISME par Stéphane Noël
Le mouvement se met en place grâce à la convergence de plusieurs conjonctures : technique, économique, socio-politique et esthétique. Depuis 1870, les progrès techniques développent un matériel photographique au maniement de plus en plus simplifié dont l’évolution aboutit au fameux « clic-clac Kodak » (« you press the button, we do the rest ») de George Eastman en 1888.
Un public croissant n’achète plus des photographies mais le moyen de les produire. Cette démocratisation de la technique ne concerne guère la population prolétaire, trop pauvre, mais profite surtout aux classes moyennes et à la nouvelle bourgeoisie qui apparaît à la faveur du déclin du libéralisme et de l’accession au pouvoir des partis démocrates.
Cette nouvelle bourgeoisie a besoin de définir son identité et son rôle dans un univers agité par les luttes ouvrières. Elle cherche, en un mot, une représentation que le pictorialisme va contribuer à lui donner.
Puisque la science avait mis la photographie à la portée du plus grand nombre, il fallait, pour conserver le privilège de la pratique photographique et se démarquer de son usage de masse, la soumettre à des règles qui favorisent ceux qui les maîtrisent, c’est-à-dire des règles qui soient difficilement transmissibles. Or, ces règles s’exercent dans un domaine dont le prestige est infaillible : l’art. Que la photographie soit un art : tel sera le grand projet esthétique de la bourgeoisie à la fin du XIXe siècle.
GLITCH NUMÉRIQUE ET NÉO PICTORIALISME
Ce mouvement pluridisciplinaire apparaît avec un certain regain d’intérêt pour les techniques photographiques anciennes. Il tente de valoriser le geste de l’artiste ainsi que sa subjectivité. Œuvre unique contre œuvre multiple, auteur contre opérateur, l'interprétation s'opposant à la transparence du réel. Le Néo Pictorialisme fait donc l'éloge de la matière, le photographe utilise le pinceau, la brosse, le grattoir.
Qu'elles soient le fruit d'une expérimentation plastique ou digitale, les images sont réalisées dans le but d'une recomposition future, et c'est par le biais de manipulations qu'elles semblent ainsi accéder au rang d 'Art.
Est-ce bien la fin du pictorialisme ? L’utilisation des canons de la peinture pour photographier a l’air d’avoir bel et bien disparue. Cependant, le jeu des matériaux existe toujours : utilisation des pinceaux, brosses et autres outils pour effacer le côté lisse et parfait de la photographie. Ces artistes, des plasticiens, sont des artistes actuels puisque ce nouveau mouvement débute au début du XXIème siècle, soit un siècle après le pictorialisme.
Comme c’est un mouvement actuel, les différentes définitions du néo-pictorialisme sont nombreuses. D’un côté, le néo-pictorialisme part de l’approche inverse du mouvement pictorialiste : au lieu d’utiliser la peinture pour créer une image photographique, le but est dorénavant d’utiliser la perfection de la photographie pour créer une peinture, un peu comme faisaient les peintres aux tout débuts de la photographie.
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